Interview
22/09/2006
Kakie : "Le maquillage ne doit pas camoufler mais révéler une femme"
Vous venez de remporter le trophée de la meilleure make-up 2006 aux Victoires de la beauté. Qu'est-ce que cela représente pour vous ? Pour tout vous dire, je n'ai toujours pas pris réellement conscience de l'importance d'une telle récompense. Cette distinction est surtout une reconnaissance vis-à-vis du grand public et de la presse. Mais dans le milieu de la mode, elle semble avoir moins d'impact. C'est plutôt une question de réputation et de feeling avec les stylistes et les photographes qui font qu'un maquilleur sera choisi ou non pour collaborer. Toutefois, ce trophée m'a valu une certaine reconnaissance de mon entourage, une fierté aussi J'ai enfin pu prouver que le métier de maquilleuse était une profession à part entière, mieux encore, une vraie création artistique, à la fois concrète et palpable, tout en restant magique. Et puis tout de même, être récompensée par un jury composé de 700 personnes, ce n'est pas rien !
Vous avez débuté votre carrière en 1985. Quel a été votre parcours jusqu'alors ? Après avoir obtenu mon bac, j'ai d'abord opté pour des études de droit, dans l'idée de devenir avocate. Cela rassurait mes parents et correspondait bien à l'idée qu'ils se faisaient de mon avenir professionnel. Mais rapidement, j'en ai eu assez. Et puis un jour, en feuilletant des magazines de mode, j'ai eu un déclic : toutes ces femmes si jolies, les podiums, les lumières et la magie qui en découle m'ont définitivement convaincue de devenir maquilleuse. Cet univers qui m'était totalement inconnu n'a fait qu'attiser ma curiosité naturelle et mon envie de relever toujours plus de défis. Je me suis donc orientée vers un CAP d'esthétique et de coiffure. Une fois mes diplômes en poche, je suis montée à Paris avec la ferme intention de m'y faire un nom. Par chance, j'ai rapidement été engagée comme assistante de Marc Shalffer, un maquilleur très connu à l'époque. C'est d'ailleurs cette première expérience qui a, en partie, influencée ma perception du milieu magique de la mode et de la beauté. Vos créations sont toujours empreintes d'originalité. Quelles sont vos sources d'inspiration ? Je voyage depuis toute jeune aux quatre coins du globe et je suis sans cesse en mouvement. L'Afrique, le Canada lorsque que j'étais enfant et aujourd'hui les grandes capitales européennes de la mode Je suis une véritable globe-trotteuse, toujours avide de découvrir de nouvelles cultures et coutumes. C'est justement à travers ces voyages que je puise mon inspiration. Les tissus, l'architecture, les bijoux et les coutumes esthétiques de différentes tribus : j'aime beaucoup faire des recherches iconographiques dans les livres ou à travers des uvres cinématographiques. Et puis, souvent, je me rends à différents salons et expositions de design, en quête des dernières tendances en matière d'ameublement. Je suis convaincue que ce sont ces mêmes tendances en décoration qui reflètent la mentalité ambiante d'une société. Selon vous, quelle place a le maquillage dans la beauté d'une femme ? Je pars du principe que le maquillage ne doit pas camoufler mais révéler une femme. Il pourrait s'apparenter à une psychologie éphémère, qui me permet d'analyser la personnalité d'une femme et ses principaux traits de caractère. Et puis, un maquillage réussi reste un maquillage qui ne se voit pas. Cela ne veut pas forcément dire qu'il sera léger ou transparent. Une femme peut tout à fait se faire un regard charbonneux tout en restant naturelle. L'important reste que les yeux soient suffisamment bien mis en valeur pour que ce soit eux qui captent l'attention, et non les matières qui les entourent. Pour certaines femmes, le maquillage peut aussi les aider à accepter certains de leurs défauts, prendre confiance en elles et affirmer leur féminité. Je me réjouis toujours de cette approche intimiste et très personnelle que peut représenter une séance de maquillage. Les femmes s'en retrouvent à chaque fois sublimées...
Racontez-nous votre plus belle collaboration ? Mon plus beau souvenir reste sans aucun doute les défilés de la styliste japonaise Junko Koshino. C'était véritablement la période la plus marquante et vibrante de ma carrière. Ses créations, à la fois modernes, chics et intemporelles m'ont permis de laisser libre cours à ma créativité. Je me souviens m'être beaucoup documentée afin de réaliser des maquillages très originaux et surréalistes tels que des masques faits de feuilles d'or et d'argent et des tatouages éphémères avec des cristaux de Swarovski. J'ai vraiment pu mettre à contribution mon côté manuel et ma fibre artistique. Vous avez maquillé de nombreuses stars. Pour vous, laquelle est la plus belle au naturel ? Toutes les personnalités que je côtoie, qu'elles travaillent dans le milieu du cinéma, de la chanson ou de la mode m'impressionnent toujours. Que se soit par leur charisme comme Emmanuelle Seigner, Sting, Milla Jovovich ou par leur personnalité comme Julie Depardieu ou Marie Drucker. Celle dont la beauté m'a le plus troublée reste sans conteste Laëtitia Casta. A la fois douce et déterminée, elle a su garder au fil des ans son teint de porcelaine, ses traits si harmonieux, en bref, une beauté rare. C'est une véritable perle au naturel avec beaucoup de prestance qui peut tout à fait se passer de maquillage. Il y a aussi Pamela Anderson... Loin des crépitements des flashs et de ses excentricités tropéziennes, cette jeune femme m'est apparue pour la première fois sans maquillage, juste avant une interview. J'étais étonnée de la voir si spontanée, en jean et en baskets et surtout si jolie sans maquillage ! On aurait dit une poupée, avec ses grands yeux bleus et ses petites taches de rousseur. Parlez-nous de vos prochaines collaborations ? Je suis actuellement sur plusieurs projets, parmi eux une série de photos pour un prestigieux magazine chinois de haute joaillerie, où je m'inspire de grands peintres tels que Bracq ou Picasso. J'ai également fait la couverture d'un nouveau magazine féminin français, mais motus, je ne peux pas encore vous révéler son nom ! Quelle est la tendance maquillage cet hiver ? Assurément rétro, chic et glamour. Les paupières se font lourdes en matières, avec des nuances foncées pour un effet charbonneux, très ténébreux. Pour les sorties nocturnes et habillés, les fards pailletés sont de rigueur. La bouche se fait quant à elle douce, subtilement glossée sur fond de tons beiges. Et puis pour celles qui osent, la tendance rouge flamboyant reste de mise cet hiver. Brillantes ou matifiées, les lèvres se font charnues, pour un effet sensuel et sophistiqué. Encore faut-il bien le porter Quant au teint, il doit être clair voire transparent et légèrement poudré pour ne pas alourdir l'ensemble du visage. Aujourd'hui, le maquillage se fait moins voyant et épais que dans les années 1980. Y-a-t-il des accessoires de maquillage indispensables ? Une trousse de maquillage doit contenir l'essentiel, à savoir d'abord, une bonne crème hydratante, c'est primordial pour préparer la peau à recevoir le maquillage. Ensuite, un mascara volumateur ou allongeant, pour gainer les cils ; une poudre bonne mine pour unifier le teint, un anti-cernes pour masquer les imperfections ; pour la bouche, un gloss de couleur légère et passe-partout, pour la faire briller, avec un crayon pour la remplir ou alors un rouge à lèvres mat. Et puis pour celles qui souhaitent tout miser sur le regard, un crayon khôl noir ou brun, placé au ras des cils pour ouvrir le regard ou à l'intérieur de l'il, pour l'adoucir. Enfin, un maquillage réussi passe par une pince à épiler, à utiliser régulièrement pour redessiner les sourcils. Certaines femmes ont tendance à négliger cette zone du visage qui a pourtant son importance. Et vous, vous maquillez-vous ? Aussi étonnant que cela puisse paraître, je ne me maquille que très légèrement et davantage lorsque j'ai une soirée habillées. Je me contente le plus souvent d'une poudre "bonne mine ", d'une légère touche de blush sur les pommettes, d'un peu de mascara noir et d'un baume hydratant pour les lèvres. Je suis plutôt réservée et discrète. J'aime donc rester naturelle, pour rester en adéquation avec mon style vestimentaire et ma façon d'être au quotidien. Avez-vous des conseils à prodiguer à nos lectrices ? J'explique toujours aux femmes qu'elles doivent se maquiller à une certaine distance du miroir, de manière à garder un effet vaporeux, moins perfectionniste et face à la lumière. Et puis la règle d'or que beaucoup de femmes ne respectent pas, c'est d'équilibrer leur maquillage et de n'utiliser que deux couleurs. Par exemple, si les yeux sont très chargés, les pommettes et les lèvres devront être légères tant en terme de matières que de couleurs. Par exemple, si vous optez pour un regard chargé en fard, en mascara et en eye-liner, avec une bouche habillée de rouge, le blush devra être neutre. Pour celles qui souhaitent se faire une bouche pulpeuse et plus volumineuse, il suffit de mettre une touche de rouge à lèvres rouge à l'intérieur de la bouche et de l'entourer de gloss. Enfin, je conseille toujours d'emporter une pochette de lingettes démaquillantes et une crème hydratante dans son sac à main. Que vous soyez en déplacement ou au bureau, offrez-vous un moment de détente dans l'après-midi, pour effacer la fatigue sur le visage. Il suffit simplement de se démaquiller le visage en évitant le contour des yeux, de l'hydrater puis finir à l'aide de quelques retouches pour le regard. C'est quand même mieux que d'aller grignoter ou faire une pause cigarette, non ? En savoir plus Le site de Kakie : www.kakie.biz Dossier réalisé par Emilie Lefèvre
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